
Les applications de notation des cosmétiqueS
Faut-il s'y fier les yeux fermés ?
Elles se sont imposées comme de véritables réflexes d’achat : vous scannez, vous lisez la note, et vous décidez. Ces applications ont le mérite d’aider à décrypter facilement et rapidement la composition des cosmétiques figurant dans une liste dite INCI. Cette liste permet de communiquer sur le contenu d’un produit cosmétique tout en gardant la confidentialité de la formule. Elle utilise toutefois un langage peu compréhensible par la plupart des consommateurs. Ainsi, des applications telles que Yuka ou INCI Beauty sont de plus en plus utilisées pour éclairer et guider le choix des consommateurs. Voyons ensemble leurs avantages et leurs limites. Peut-on vraiment s’y fier ? Ne faut-il pas nuancer ?

NABILA
Octobre 2025
1. Qu’est-ce qu’une liste INCI ?
a. Définition de la liste INCI
La liste INCI (International Nomenclature of Cosmetic Ingredients) est la nomenclature internationale utilisée pour indiquer la composition des produits cosmétiques dans un langage universel. Obligatoire sur tous les emballages primaires ou secondaires, elle présente les ingrédients dans un ordre décroissant de concentration. Les extraits végétaux sont mentionnés sous leur nom latin et les substances chimiques sous leur nom anglais. Toutefois, les ingrédients présents à moins de 1 % peuvent être listés, après ceux présents à plus de 1 %, dans n’importe quel ordre. La liste INCI doit, en plus des ingrédients, mentionner en fin de liste les allergènes dès lors que leur concentration dans le produit fini dépasse 0,001 % pour les produits non rincés, et 0,01 % pour les produits rincés. Les allergènes ne sont pas des ingrédients en soi mais des substances potentiellement présentes et issues d’ingrédients tels que les huiles essentielles ou les substances parfumantes. Comme ils sont mentionnés à la suite des ingrédients composant le produit, il n’est pas facile, pour le commun des mortels, de savoir si les derniers termes listés sont des allergènes ou des ingrédients en soi.
b. Une nouvelle réglementation plus stricte sur la mention des allergènes
Initialement, la liste des allergènes à étiqueter comprenait 26 substances définies par le règlement cosmétique européen. Cependant, une nouvelle règlementation parue en juillet 2023, prévoit l’obligation d’étiqueter 82 allergènes, au lieu des 26 actuels, à compter de juillet 2026 pour tout nouveau produit et au plus tard d’ici juillet 2028 pour les produits existants. Chez L'ODAÏTÈS, nous avons fait le choix de la transparence et avons décidé de commencer d’ores et déjà à nous conformer à cette nouvelle règlementation bien avant les dates limites. Ainsi, l’étiquetage de notre crème riche, qui a vu le jour en octobre 2024, donc avant juillet 2026, mentionne d’ores et déjà une liste d’allergènes conforme à ce nouveau règlement. C’est aussi le cas pour notre roll-on nourrissant, notre lotion multi-actions, notre sérum redensifiant et notre huile universelle. Ce sera le cas en décembre pour notre sérum éclat et en 2026 pour le reste de la gamme et ainsi une conformité à cette nouvelle réglementation d’ici fin 2026, donc bien avant juillet 2028.
2. Les applications de notation : avantages & limites
De nombreuses applications françaises ont vu le jour mais seules Yuka, QuelProduit et INCI Beauty persistent réellement aujourd’hui.
a. Les avantages des applications de notation
Elles éveillent les consciences : les consommateurs sont de plus en plus enclins et nombreux à s'interroger sur la composition des formules ainsi que la qualité et l’innocuité de leurs ingrédients.
Elles attirent l’attention sur la présence d’ingrédients controversés, que leur effet soit prouvé ou parfois juste suspecté par manque de recul ou d’études.
Elles donnent des repères : un système de notation simple (notes, couleurs, smileys…) qui facilite la comparaison rapide entre les produits.
Elles poussent l’industrie à évoluer : certaines marques ont reformulé leur produits cosmétiques pour améliorer leurs scores sur les applications de notation.
b. Les limites des applications de notation
Des scores qui peuvent être trompeurs : en effet, la présence d’allergènes dans un produit dégrade automatiquement son score. Pour autant, ces allergènes ne concernent que l’infime partie des personnes qui y sont allergiques. Prenons l’exemple de la nourriture : certaines personnes sont allergiques aux fruits à coque, mais pour autant les fruits à coque restent tout à fait sains pour les personnes non allergiques. Les allergènes ne sont donc en aucun cas un signal sur la qualité ou la dangerosité en soi du produit ou de ses ingrédients. Ainsi, les cosmétiques contenant des huiles essentielles - actifs puissants et complexes - sont souvent pénalisés à tort à cause de la présence potentielle d’allergènes alors même que la concentration des allergènes est déjà cadrée par la règlementation cosmétique. Nous vous conseillons donc, lorsque vous regardez le score d’un produit, de porter en particulier votre attention sur les ingrédients du produit et non sur les allergènes, surtout si vous n’avez pas d’allergies.
Des scores qui peuvent être faux : en effet, il n’est pas rare de voir une erreur d’analyse résultant de la confusion entre deux ingrédients qui a pour conséquence de dégrader à tort le score de certains produits. En effet, l’application Yuka ne fait pas de distinction entre le terme “Alcohol” qui est l’alcool standard (alcool éthylique) et les termes “Stearylic alcohol”, “Cetyl alcohol”, “Behenyl alcohol”... qui sont des alcools gras permettant de stabiliser les formules et qui n’ont absolument rien à voir avec l’alcool, substance servant à désinfecter, solubiliser ou encore dégraisser. Pire encore, Yuka confond deux substances fondamentalement différentes comme l'octinoxate et l’ethyl ferulate (Cf. explications plus bas). Yuka n’est pas la seule à mal interpréter. Tandis que Yuka met un feu vert, à juste titre, à l’ammonium acryloydimethyltaurate/vp copolymer (ingrédient sans risque) ou encore le sodium hydroxide (un ingrédient sans risque utilisé même en tant qu'additif alimentaire - symbole E524), INCI Beauty va dégrader le score en présence de ces ingrédients !
Elles ne distinguent en aucun cas la qualité d’un ingrédient : en effet, il faut savoir que la liste INCI nomme, par exemple, de la même manière une huile végétale, qu’elle soit vierge ou raffinée. Or, le processus de raffinage d’une huile végétale lui fait perdre la majeure partie de sa teneur en acides gras essentiels - Omega 3 et 6 - et en insaponifiables ; ces composants essentiels qui confèrent à l’huile végétale ses pouvoirs antioxydants et régénérants. Les huiles vierges, nombreuses parmi nos principes actifs, ne sont malheureusement pas valorisées à juste titre par ces applications.
Une vision simpliste : qui note la qualité de chaque ingrédient de manière isolée et ne note en rien la potentielle synergie entre ingrédients ou la qualité de la formule dans sa globalité.
3. Quid des notes de nos soins et comment les interpréter ?
Voici un tableau récapitulant les scores pour nos soins pour les 3 applications les plus répandues. En résumé, les scores INCI Beauty de nos soins sont en vert et varient entre 15,9/20 et 20/20 selon le soin. Les notes Yuka de nos soins varient entre “Excellent” et “Bon”. Sur QuelProduit, nos “scores” (codes couleurs) varient entre jaune (risque limité) et vert (aucun risque). Ainsi, tous les ingrédients sont au vert, déduction faite des allergènes.

Il est important d’apporter un éclairage au sujet de notre crème riche notée 55/100 (Bon) par Yuka. Tous les ingrédients sont au vert à l’exception de l’éthyl ferulate. Nous avons cherché à comprendre les raisons pour lesquelles Yuka mésestime la présence de l’ethyl ferulate.
Qu’est-ce que l’ethyl ferulate ? Il s’agit d’un dérivé estérifié de l’acide férulique, un antioxydant naturel présent notamment dans le son de riz, le maïs ou les céréales.
À quoi sert-il ? Il est utilisé en cosmétiques pour ses propriétés antioxydantes puissantes, son effet photo-protecteur complémentaire, sa bonne stabilité et sa tolérance cutanée élevée.
Ce que Yuka lui reproche : Yuka le classe automatiquement en jaune voire orange car, en raison de son analogie avec l’octinoxate - filtre UV synthétique -, il serait suspecté de perturber le système endocrinien. Mais l’ethyl ferulate est fondamentalement différent de l’octinoxate. Il est d’origine végétale et n'est pas simplement une version modifiée de l'octinoxate ! Ces affirmations sur l’ethyl ferulate sont peu sourcées, non appuyées par les données réglementaires européennes, et absentes des grands rapports de veille toxicologique (SCCS, CIR, etc.). Yuka précise aussi que peu d’études ont été réalisées sur la toxicité de l’ethyl ferulate (toujours en le confondant avec l’octinoxate) et que, pour ces deux raisons, ils estiment qu’il est à surveiller par principe de précaution.
Ce que disent les sources scientifiques : l’Union Européenne n’a donné aucune alerte réglementaire et l’ethyl ferulate y est autorisé sans restriction particulière. Des études in vitro et in vivo soulignent son innocuité et son intérêt dermatologique (notamment en protection contre le stress oxydatif induit par les UV ou la pollution). Il est, de plus, considéré comme un ingrédient “green” compatible, apprécié dans les formules naturelles ou clean. D’ailleurs, l’ethyl ferulate que nous utilisons est même certifié par les 2 organismes de labellisation biologique et écologique : Ecocert et Natrue !
Ainsi, la note n’est pas un reflet juste de la réalité scientifique ou réglementaire. Il est d’ailleurs fort probable que Yuka finisse par requalifier cet ingrédient cosmétique quand ils en auront acquis la maitrise.